Il y a des moments où l’histoire bascule sans que personne ne s’en rende compte.
Le 6 mars 2025, la Chine a discrètement lâché Manus dans la nature. Un agent autonome. Une IA capable de prendre des décisions, exécuter des tâches complexes, négocier, investir, sans supervision humaine.
Jusqu’ici, l’intelligence artificielle s’est toujours pensée comme un copilote, un assistant qui attend qu’on lui donne un ordre. Manus ne demande pas. Il fait.
Besoin d’analyser des milliards de transactions ? Manus s’en charge. Trouver le meilleur investissement ? Manus scanne, compare, décide. Automatiser des décisions stratégiques ? Manus exécute, sans attendre d’instruction humaine.
L’impact de Manus dépasse largement le cadre technologique.
Ce n’est plus une simple avancée, mais une fracture inédite dans l’évolution de l’intelligence artificielle. Jusqu’ici, nous étions dans l’ère des IA réactives. Manus inaugure celle des IA initiatrices, capables d’agir de manière autonome. C’est une rupture qui pose une question fondamentale : à quel moment une IA cesse-t-elle d’être un simple outil pour devenir un acteur économique à part entière ?
Les répercussions économiques sont considérables. Si Manus tient ses promesses, il court-circuite toute une classe de travailleurs du savoir : analystes, gestionnaires, consultants… Ce qui relevait du travail humain devient exécutable en autonomie, à une vitesse inégalée. Loin d’être une simple amélioration des outils existants, cette IA pourrait redéfinir le fonctionnement des entreprises et du marché de l’emploi à l’échelle mondiale.
Mais la rupture est aussi géopolitique. Pendant que l’Europe tente d’enfermer l’IA dans un carcan réglementaire et que les États-Unis peinent à formuler une vision cohérente, la Chine impose une nouvelle norme. Un modèle open source, exploitable par tous. Un standard technologique qui pourrait s’imposer dans les entreprises du monde entier. Un outil qui échappe totalement au cadre occidental.
Peu de monde semble encore mesurer la portée de cette avancée. Manus n’est pas un produit, c’est une déclaration d’intention. L’intelligence artificielle n’est plus un simple outil. Elle devient un agent.
Il y a deux semaines, Microsoft affirmait avoir franchi une étape décisive dans l’informatique quantique avec Majorana, son approche révolutionnaire pour stabiliser les qubits et enfin rendre le quantique « utile ». (cf. le monde de demAIn #6)
La Chine, toujours elle, vient de répondre. Brutalement.
Pékin annonce Jiuzhang 3, un ordinateur quantique dont la puissance de 105 qubits dépasse l’entendement : un million de milliards de fois plus rapide que les supercalculateurs actuels.
Pendant que les États-Unis imposent des restrictions sur les semi-conducteurs, la Chine démontre qu’elle n’a plus besoin d’importer l’innovation. Elle la crée.
Ce n’est pas qu’une avancée technologique. C’est un message.
L’informatique quantique est un domaine stratégique. Celui qui en prend le contrôle impose ses règles sur le chiffrement, la cybersécurité, l’optimisation des flux financiers et industriels. C’est une arme économique, militaire et scientifique.
Avec Jiuzhang 3, la Chine montre qu’elle n’est pas simplement dans la course au quantique, mais qu’elle pourrait bien avoir pris une longueur d’avance.
Et surtout, elle prouve que l’embargo américain sur les technologies avancées ne freine en rien son ambition. En restreignant l’accès de Pékin aux composants et au cloud quantique, les États-Unis espéraient ralentir son développement. La Chine leur répond en développant des solutions indépendantes.
Microsoft pensait poser la première pierre du futur avec Majorana. Pékin vient peut-être de dynamiter la ligne d’arrivée.
C’est officiel : la Maison-Blanche s’apprête à automatiser une partie de la fonction publique fédérale. L’objectif affiché ? Gagner en efficacité, réduire la bureaucratie, optimiser les coûts. Mais ne soyons pas naïfs : derrière ce vernis technocratique, il s’agit avant tout de remplacer des fonctionnaires par des algorithmes.
Première vague d’expérimentation : GSAi, un chatbot développé pour épauler, rationaliser… et à terme, remplacer certaines tâches administratives. Dès cette semaine, 10 000 employés fédéraux testeront cet assistant numérique. Un pas vers une administration plus efficace ? Ou le début d’un plan d’éradication en douceur du fonctionnaire américain ?
L’Amérique n’a jamais aimé la bureaucratie. Elle préfère la vitesse, l’optimisation, l’automatisation. Biden n’a fait que poser la première pierre d’une transformation inévitable : l’administration publique devient un logiciel, et ses employés des lignes de code obsolètes.
Là où l’État était autrefois un contre-pouvoir face aux grandes entreprises technologiques, il est en passe de devenir leur plus gros client. Qui fournira ces algorithmes de gouvernance ? Google, Palantir, OpenAI ? Autrement dit, l’État ne s’automatise pas : il privatise son fonctionnement.
Moins de fonctionnaires, plus de serveurs. Moins de décisions humaines, plus de modèles prédictifs. On promet moins d’erreurs, mais qui code les algorithmes qui écriront l’avenir ?
Un État qui se transforme en SaaS, une démocratie administrée comme un abonnement Premium.
Reste une question : quand tout sera géré par des IA, qui gérera l’IA ?
Tim Berners-Lee, inventeur du World Wide Web au CERN en 1989, l’avait rêvé comme un espace ouvert, libre et accessible à tous. Il devait permettre le partage des savoirs, la collaboration sans frontière, une véritable révolution démocratique.
Mais aujourd’hui, le créateur du web voit son invention trahie.
L’IA, loin d’amplifier cette promesse originelle, l’étouffe lentement. Elle ne travaille pas pour nous, mais pour ceux qui la contrôlent. Derrière ChatGPT, Gemini et autres assistants numériques se cache un web reconfiguré, où l’accès à l’information dépend de filtres invisibles, dictés par les intérêts privés des grandes plateformes.
Google, OpenAI, Meta ont tissé la toile. Selon Berners-Lee le web n’est plus un écosystème ouvert, c’est devenu un monopole algorithmique. Ce sont désormais les IA qui sélectionnent ce que nous lisons, ce que nous découvrons, ce que nous croyons.
À l’occasion du festival SXSW à Austin au Texas, le père du web a tiré la sonnette d’alarme : il est temps de reprendre le contrôle.
Son combat ? Redonner aux utilisateurs la maîtrise de leurs données, briser l’emprise des géants de la tech et réinventer un web décentralisé. Une mission cruciale, mais qui se heurte à une réalité brutale : ceux qui possèdent l’IA n’ont aucun intérêt à rendre le pouvoir.
Internet nous a ouvert le monde.
L’IA est peut-être en train de nous y enfermer.
Il y a des alliances stratégiques. Des partenariats solides. Et puis, il y a ce que vient de faire OpenAI à Microsoft.
Après avoir reçu 13 milliards de dollars de la firme de Redmond et avoir installé ChatGPT, DALL·E et GPT-4 au cœur d’Azure, OpenAI décide… d’investir dans CoreWeave, un concurrent direct de Microsoft dans le cloud.
CoreWeave, pour ceux qui l’ignorent, est une startup spécialisée dans l’hébergement de modèles d’IA sur des GPU Nvidia, en train de devenir l’un des principaux challengers du marché cloud dominé par AWS, MS Azure et Google Cloud.
Avec ce coup de poignard, le message est limpide : OpenAI ne veut pas dépendre de Microsoft, ni de personne d’ailleurs. Derrière l’alliance affichée, Sam Altman continue de sécuriser son indépendance, et surtout, son infrastructure cruciale dans la course à l’AGI, l’intelligence générale, synonyme de corne d’abondance pour son découvreur…
Microsoft pensait avoir scellé un partenariat exclusif, mais la réalité du marché de l’IA est plus cruelle. Aujourd’hui, les modèles d’OpenAI sont toujours hébergés chez Azure, mais demain ?
OpenAI se diversifie, cherche des alternatives, brouille les pistes. Et pour Microsoft, le signal est clair : même les partenaires les plus fidèles peuvent avoir des plans B.
Satya Nadella, PDG de Microsoft, a récemment qualifié l’engouement pour l’IA générative de « insensé », ce qui semble critiquer les ambitions d’OpenAI en matière d’AGI et les gars de Redmont développent activement leurs propres modèles d’IA et teste des alternatives provenant d’autres entreprises comme xAI, DeepSeek et Meta
Dans le grand jeu de l’IA, la loyauté est devenue un concept marketing parmi tant d’autres…
Pendant que l’IA s’impose dans tous les secteurs, les entreprises suisses pourraient foncer tête baissée dans un terrain miné.
Près de la moitié des PME du pays ont déjà intégré l’IA générative dans leurs processus : rédaction, traduction, publicité, création d’images. Le gain de temps et de coûts est indéniable. Mais à quel prix ?
Sabrina Konrad, cheffe suppléante du service juridique « Droit d’auteur » à l’Institut Fédéral de la Propriété Intellectuelle (IPI), alerte sur un point clé : les conditions d’utilisation des plateformes d’IA sont un piège trop souvent ignoré.
Certaines clauses permettent aux fournisseurs d’IA de réutiliser les créations des utilisateurs pour entraîner leurs modèles. D’autres imposent des restrictions insoupçonnées sur l’usage commercial des contenus générés.
En clair, ce que vous produisez avec Midjourney, DALL·E ou Gemini 2.0 flash pourrait ne pas vraiment vous appartenir.
Dans un pays où la protection des données et de la propriété intellectuelle est un pilier stratégique, cette mise en garde est cruciale. Pour les entreprises suisses, il ne s’agit pas seulement de risques juridiques, mais aussi de souveraineté économique.
Si les PME veulent éviter que leur créativité et leur savoir-faire deviennent du carburant gratuit pour les Big Tech, elles doivent reprendre le contrôle. Lire attentivement les conditions d’utilisation. Vérifier la réutilisation des données par les plateformes. Se tourner vers des solutions souveraines et locales.
Car une IA qui vous facilite la tâche aujourd’hui pourrait bien demain vous la compliquer.
Trois étudiants en mathématiques de l’Université de Lecce en Italie viennent de réussir ce que des millions de joueurs rêvent de faire : battre la loterie. Et pas juste une fois. Grâce à un algorithme d’apprentissage automatique, ils ont analysé les tirages des deux dernières années pour repérer les numéros les plus susceptibles de sortir. Verdict ? Une première victoire à 4 500 euros, suivie d’un pari plus ambitieux qui leur a rapporté 43 000 euros supplémentaires.
En tout, 47 200 euros de gains. Pas mal pour un simple projet étudiant.
Bien sûr, les trois compères ne prétendent pas avoir « craqué » la loterie. Ils savent que le hasard règne encore en maître. Mais leur expérience prouve que l’intelligence artificielle peut analyser des tendances et exploiter les moindres probabilités mieux qu’un humain ne le fera jamais.
Jusqu’ici, on imaginait l’IA au service de la médecine, de la finance ou de la recherche scientifique. Désormais, elle se met aussi à jouer. Et elle gagne.
La vraie question n’est donc pas « L’IA peut-elle battre le loto ? », mais plutôt « Jusqu’où ira-t-elle ? ». Car si aujourd’hui elle se contente d’optimiser les probabilités, demain, avec encore plus de données et de puissance de calcul, qu’est-ce qui l’empêchera de transformer le hasard en science exacte ?
Il y a fort à parier que les organisateurs de loteries observent l’affaire de très près. Car si l’IA commence à battre systématiquement les jeux de hasard, alors il ne restera qu’une seule solution pour les casinos et les loteries : changer les règles du jeu.
Parler à une IA qui vous répond avec des pauses naturelles, des hésitations, un ton adapté au vôtre ? C’est la promesse de Sesame, la startup fondée à San Francisco par Brendan Iribe, l’ex-PDG d’Oculus VR.
- Conversations ultraréalistes avec une IA qui module sa voix en temps réel
- Interactions immersives, loin du ton robotique des assistants actuels
- Démo bluffante accessible en ligne (Anglais pour l’instant)
- Intégration dans des lunettes connectées pour un compagnon IA permanent
Tous ceux qui rêvent d’un assistant IA qui ne répond pas seulement, mais qui discute vraiment – et bientôt, qui vous accompagnera partout où votre nez ira…
Une IA qui vous écoute, vous suit et observe le monde à vos côtés…